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littérature, traduction - Page 8

  • Lectures théâtrales

    carel.gifInséparables ! de Fanny Carel
    L’école des loisirs, théâtre, 2008

     

    Violette et son frère Bruno sont aux prises avec Nasta, une abominable marâtre qui a tué leurs parents ; refusant de les voir grandir, elle affame délibérément les deux petits. Mais Violette n’y tient plus et les enfants prennent la fuite. L’amour qu’ils éprouvent l’un pour l’autre ne suffira pas à les sauver des griffes de Nasta, et il faudra l’intervention d’un roi pour qu’enfin ils puissent vivre en paix.
    Dans cette pièce inspirée de nombreux contes, la résilience enfantine (ou simplement humaine) est à l’honneur. Le conte s’achève avec la mort de la sorcière, incarnation du mal et de la cruauté, mais aussi de la part sombre de la maternité (quand elle maintient volontairement les enfants dans un état de dépendance alimentaire). Ces ramifications psychanalytiques fort intéressantes (qui satisferont les lecteurs adultes) témoignent de la richesse des niveaux de lecture de ce texte.

     

    milovanoff.jpgLa carpe de Tante Gobert de Jean-Pierre Milovanoff, illustrations de Lino

    Actes Sud papiers - collection Heyoka jeunesse, 2008

     

    Selon son père, Philippon pourrait être « le meilleur élève du collège », s’il n’était pas un cancre… Pour le remettre dans le droit chemin, on envoie le garçon en vacances forcées chez Tante Gobert, une « femme rude et imprévisible » qui n’a qu’une obsession depuis 30 ans : pêcher le plus beau poisson du lac situé devant sa masure. Au fil des rencontres – un lutin, une carpe, un peintre, une jeune fille, un pêcheur – la tante revêche se radoucit… Mais Philippon mûrit-il vraiment ? Rien n’est moins sûr. Cette histoire fantaisiste, agréablement illustrée, entrecoupée de chansons, est une comédie légère qui célèbre avant tout l’insouciance de l’enfance : « Enfant, on reste un enfant / Pas moyen de faire autrement, On s’amuse et on attend / Le jour où l’on sera grand / Pour regretter le bon temps », ainsi que l’affirme l’un des chants.

     

    gauthier.gifUne jeune fille et un pendu de Philippe Gauthier

    L’école des loisirs, théâtre, 2008

     

    Dans un décor indéfini dominé par un vieux chêne, Marc, une corde autour du cou, voit arriver Déborah, une jeune fille aux jambes ensanglantées. Tandis que le garçon tâche de lui transmettre sa passion pour les chiffres (et son besoin compulsif de compter tout ce qui lui tombe sous la main, des feuilles aux flocons de neige), Déborah lui apprend à danser. Ils s’attachent l’un à l’autre au fil des saisons, jusqu’au jour où un certain Pierre entre en scène...
    Le texte, qui met en contact deux souffrances, est composé dans une langue familière, aux phrases brèves, coupantes. La vie, la mort, l’amour s’enchevêtrent entre tragédie et légèreté, tandis que les corbeaux qui s’insinuent entre les scènes, commentant les activités des humains ou vivant leur propre vie (avec ses querelles, ses amitiés ou ses attachements) participent de la tonalité parfois très irrévérencieuse de l’ensemble ; une impertinence qui, au-delà du sort tragique des personnages et de la thématique, nous arrache quelques sourires.

     

     (Blandine Longre, décembre 2008)

     

    Ces articles ont paru en compagnie de quelques autres dans le numéro 244 de La Revue des livres pour enfants (La Joie par les livres / BNF, décembre 2008)

    les autres numéros : les sommaires des numéros des deux dernières années sont consultables en ligne. Les numéros des années précédentes ont été numérisés et sont consultables en texte intégral sur le site. 

    http://www.ecoledesloisirs.fr/index1.htm

     

    http://www.actes-sud.fr

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  • Un auteur à ses lecteurs

    spielberger4.jpgDepuis le 1er janvier, l'écrivain Christophe Spielberger (Touché !, Editions du Seuil, Otto le puceau, Florent Massot) propose aux internautes de lire gratuitement ses derniers romans inédits, à partir de son site où les textes sont consultables sur écran, mais également imprimables en intégralité. Selon l’auteur, cette démarche n’est pas une fin en soi et ne saurait se substituer au travail de l’éditeur (dont il espère à nouveau bénéficier un jour), mais elle représente le moyen de permettre à ses lecteurs de continuer à le suivre, voire de le découvrir avant de se rendre en librairie, où plusieurs de ses ouvrages restent disponibles.

    Pour bénéficier de cette bibliothèque en ligne, il suffit de contacter l’auteur à partir de la page d’accueil de son site afin d’obtenir un accès personnel à une vingtaine de textes, parmi lesquels cinq romans.

    Christophe Spielberger est l'auteur de plusieurs romans dont On part, et d'un ouvrage intitulé La vie triée.
    On pourra lire quelques chroniques le concernant dans Sitartmag.

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  • Le Visage Vert - bis

    Je parlais récemment de la revue de littérature Le Visage Vert et de son numéro 15.

    Romain Verger, que l'on retrouve aussi ici, lui consacre un bel article dans Sitartmag.

     

    Le Visage vert , revue de littérature, n° 15 (éditions Zulma, responsable de la rédaction : Xavier Legrand-Ferronnière)

     

    Pour information : Le Visage Vert est édité par l'association Le Visage Vert depuis 1995. Le n° 1, auto-édité, est épuisé, mais un retirage est envisagé. Les numéros 2 à 13 — coédités avec les Éditions Joëlle Losfeld — ne sont plus disponibles en librairie, mais on peut les commander directement auprès du Visage Vert, au numéro, ou sous forme de collection « complète ». Enfin les numéros les plus récents (14 et 15) sont coédités avec les Éditions Zulma et donc disponibles en librairie. A partir de cette année (2008) le Visage Vert propose une collection d'ouvrages.

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  • Karpe diem...

    karmasutra.jpgKarma Sutra, 30 positions à fantasmer
    de Maïa Brami et Barroux

    Magellan & Cie, 2008

     

    Caractérisé par un humour léger et un ton vivifiant, cet ouvrage atypique, unique en son genre, énumère des positions sexuelles fantasques tout en égrenant quelques conseils (à ne pas suivre pour certains !) permettant de jouir au mieux de la rencontre amoureuse et/ou charnelle…

    Les textes, courts poèmes subtils qui évitent habilement l’écueil de la vulgarité, décrivent chaque acrobatique position (de celle du petit-beurre à celle du bourdon ardent…), et sont accompagnés d’illustrations graphiquement sobres, qui suggèrent plus qu’elles ne montrent – et, quand elles montrent, la fantaisie l’emporte haut la main. Attention, ne vous méprenez pas sur l’objectif de ce beau livre, qui prend le contrepied des guides et autres manuels susceptibles d’éradiquer toute spontanéité : ici, la lecture stimule avant tout le cerveau et l’imagination de chacun.
    (B. Longre, janvier 2009)

     

     

    Afin de mieux saisir la démarche des auteurs, quelques question posées à Maïa Brami, qui a bien voulu y répondre.

     

    Maïa Brami, comment est né ce projet ? De quelles envies ?

    Ce projet est né autour d’une table, dans un Café. Barroux et moi étions en train de travailler à un album jeunesse — « Goûte au moins » ed. Circonflexe, 2005 — quand il m’a confié son envie de dessiner des hommes et des femmes… tous nus ! Il a alors joint le geste à la parole et en découvrant son croquis sur la nappe un peu « naïf » proche du dessin d’enfant, j’ai compris que notre projet serait certes érotique mais traité sous un angle drôle et poétique. Dans une société où les cartes de St Valentin ont été remplacées par des canards vibrants, nous avons eu envie de rappeler aux gens que le désir est avant tout affaire d’imagination. D’où la phrase d’exergue tirée du film culte des Frères Cohen — The Big Lebowski : « Les gens oublient que le cerveau est la plus grande zone érogène », réplique lancée par le producteur de films porno joué par Ben Gazzara. 

     

    De quelle façon avez-vous procédé ? Les textes d’abord, les illustrations venant ensuite, ou bien l’inverse ou dans le désordre ?

    Après avoir parcouru le véritable Kama Sutra — hautement instructif et surtout d’une grande poésie ! —, je me suis dit qu’il serait amusant d’inventer des positions infaisables, surréalistes. Et très vite, je me suis aperçue qu’en prenant les mots au pied de la lettre — « s’envoyer en l’air » par exemple —, on arrivait à des situations cocasses. Chacun a ensuite apporté de l’eau au moulin. Nous avons essayé de veiller à ce qu’il y en ait pour tous les goûts ! De l’écriture proprement dite, je me souviens surtout de mes éclats de rires toute seule devant mon écran d’ordinateur ! Après avoir imaginé une trentaine de positions, Barroux a pris ses plus beaux pinceaux pour en peindre quelques-unes dans un style élégant et épuré — contours noirs et lavis ocre. Nous sommes ensuite allés démarcher les éditeurs.

     

    Justement, comment ce projet a-t-il été accueilli par les éditeurs ? Avez-vous eu des retours plutôt positifs dans l’ensemble ?

    Dans l’ensemble, les éditeurs se  sont bien amusés à la lecture, mais tous nous ont répondu qu’il n’entrait dans aucune case — N’est-ce pas pourtant le propre de tout projet artistique ?! Cependant, nous avons eu le choix entre Magellan & Co et un éditeur de littérature érotique, mais ça aurait cantonné le livre à un public d’avertis.

     

    Il est rare de parler de sexualité de façon aussi décalée. Des ouvrages qui traitent du rapport amoureux vous ont-ils inspirée, stimulée ou irritée ?

    Je trouve absurde toutes ces émissions télés et ces journaux qui réduisent le sexe à un plaisir égoïste qu’il faut assouvir à tout prix et par n’importe quel moyen — commercial de préférence —  au risque d’être taxé d’anormal ! Le sexe est avant tout langage, dialogue, jeu amoureux fondé sur une écoute et un don mutuels, où l’on n’a jamais fini de se surprendre et de s’amuser.

     

    À travers vos publications, vous êtes généralement associée à la littérature jeunesse (tout comme l’illustrateur Barroux). Pensez-vous que cet ouvrage marque un tournant dans votre travail ?

    Un tournant ? Je ne pense pas. Chaque projet m’apprend et m’empêche de tomber dans la répétition. De son côté, Barroux a publié des carnets de voyage qui visent un public adulte et il a pas mal travaillé pour la presse. Vous savez, ce qui me motive avant tout, c’est d’écrire, peu importe l’âge du lecteur pourvu qu’il y en ait un !

     

    http://www.barroux.info

     

    http://www.editions-magellan.com/

     

    Maïa Brami est aussi l'auteure de Norma, de Neuf mois par moi, et de nombreux ouvrages pour la jeunesse.

     

     

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    9mois.jpg9 mois par moi de Maïa Brami et Karine Daisay, La Martinière, 2007

    Maïa Brami et Karine Daisay ont concocté un ouvrage réalisé avec soin, poétique et innovant, qui se démarque du journal intime traditionnel ou des multiples guides existants, un livre-cahier qui tient davantage du carnet de bord ; elles proposent ainsi aux futures mères (et ce sans exclure les pères) de mettre en mots et en images l’expérience de leur grossesse, en offrant poésie, citations, recettes traditionnelles, et guide des prénoms (venus du monde entier) qui sort des sentiers rebattus. Les décors monochromes, discrètement rehaussés de collages et d’illustrations très sobres, qui évoquent pour la plupart vie végétale et animale, permettront de faire sien ce cahier où tout reste évidemment à écrire (et/ou à coller). Une belle incitation à la création, à la réflexion, à la rêverie et, plus tard, aux réminiscences.
    B. Longre (mars 2007)

    barroux.jpgMon poisson rouge de Barroux, Nathan, 2006

    Quoi de plus banal et d'ennuyeux qu’un poisson rouge qui tourne dans son bocal ? Ce n’est pourtant pas l’avis de Barroux, pour qui le poisson rouge peut devenir un fabuleux animal de compagnie… à condition de faire preuve d’imagination ! Le poisson en question est costaud, curieux et téméraire (mais pas trop…), il aime chanter, se déguiser, nager (de préférence en piscine), mais par contre, il mange comme un cochon, attrape des coups de soleils et a plutôt mauvaise mémoire… On peut le consoler quand il a peur la nuit et lui offrir son amour, ce qui lui permettra d’atteindre un âge canonique. Barroux signe là son premier ouvrage en tant qu’auteur-illustrateur, un album cocasse et décalé qui enchante les jeunes lecteurs ; de belles illustrations (entre peinture et gravure), des coloris vifs et contrastés, pour le portrait original d’un petit poisson en définitive très attachant…
    B.L. (février 2006)

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  • La burqua ne fait pas le moine

    burquette.jpgBurquette, de Francis Desharnais
    Les 400 coups, collection Mécanique Générale, 2008

     

    Un intellectuel québécois en quête d’idées nouvelles à explorer s’inquiète pour sa fille Alberte, « un chef-d’œuvre de superficialité », alors qu’il aimerait tant en faire une « grande intellectuelle », à son image. Afin de provoquer une contre-réaction selon lui nécessaire, il décide de lui imposer le port d’une… burqua. La jeune adolescente se plie difficilement à son nouveau « costume » et on la retrouve, d’une saynète à l’autre, dans diverses situations quotidiennes où l’habit est censé lui compliquer l’existence. Malgré ses réticences et ses tentatives de rébellion (certes de plus en plus marquées au fil du temps), le père ne cède pas, persuadé que cette expérience à la fois individuelle et sociale ne peut être que bénéfique. Et quand Alberte lui dit : « Sous ce drap et derrière ce grillage, je me sens inexistante, sans identité. Je crois que j’arrive à comprendre ce que vivent les femmes dont tu parles », le père rétorque avec un cynisme dont il n’a pas nécessairement conscience : « C’est très bien, ma chérie. Ça prouve que la leçon porte fruit. Dans un an, tu vas être un chef-d’œuvre de profondeur humaine. »…

     

    Dans cette bande-dessinée conçue comme une succession de strips et de gags souvent amusants, les deux protagonistes principaux sont observés et décrits par petites touches, avec beaucoup de justesse, des tiraillements de la fille (qui a peur de décevoir un père dont les exigences sont pourtant fort malsaines) à l’autosatisfaction d’un père tyran proprement insupportable qui, sous des dehors « tolérants », est pétri de préjugés. L’intelligence du propos se fonde sur la façon détournée d’aborder une pratique religieuse obscurantiste dont on connaît le symbolisme inégalitaire et les graves dérives : en la replaçant dans un contexte inhabituel, voire farfelu (en tout cas invraisemblable) et en l’extrayant du fait religieux lui-même, l’auteur la vide de ses significations et nous incite à prendre de la distance ; aussi, il parvient, par le biais de la dérision, à mettre en relief les absurdités inhérentes à la pratique, sans la dénoncer de manière brutale ni imposer un angle moraliste. Le dénouement, savoureux, est à la hauteur de ce qui précède, tout particulièrement quand la jeune Alberte, plus fine que son père le croit, réussit à se réapproprier le costume à sa façon et se réjouit d'aller vivre avec sa mère... strip-teaseuse !

     

    http://www.francisd.com/

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  • Le jeu troublant de l’existence

    dlachaud.jpgLe vrai est au coffre, de Denis Lachaud - Actes Sud, 2005 / Babel 2009

     

    Des parents aimants et une atmosphère familiale relativement paisible ne pourront empêcher le petit Thomas, qui démarre son récit à l’âge de cinq ans, de peu à peu glisser dans un monde parallèle, semi imaginaire, qui annonce de façon ténue la fracture identitaire à venir. Les indices offerts au lecteur sont d’abord maigres : la création, entre autres, d’une famille virtuelle avec son amie Véronique et ses poupées, un éparpillement de réalités qui se superposent dans l’esprit du jeune narrateur et qui n’inquiètent pas d’emblée, des jeux en surface innocents qui ouvrent pourtant la voie à un malaise plus ample, qui prend corps quand Thomas (Tom pour lui-même et Toto pour ses parents…) entre à l’école primaire, et devient le bouc émissaire d’une catégorie brutale d’élèves, prompts à tourner en dérision son comportement qu’ils disent efféminé.

    Car Tom n'est pas comme les autres, il est un enfant solitaire et curieux, fasciné par la grue du ferrailleur ou par les trains (dont le passage le terrorise pourtant chaque nuit) et l’alignement de voies de chemin de fer qui se croisent en bas de son immeuble : il s’approprie ce vaste espace au fil des années, rien qu’en l’observant depuis la fenêtre du plus haut palier de l'édifice. Un lieu où, justement, la vie de sa petite famille de poupées s’organise avec sérieux.

    L’écriture, d’abord lisse et comme patinée par le temps, régentant un récit dont le fil paraît limpide, se fissure à mesure que l’on se rapproche de l’événement central qui va conduire à une métamorphose confuse et troublante, passionnante. La narration nous autorise à démêler le vrai du faux - tout dépendra cependant du lecteur, de son degré d’aptitude à accepter la fiction et ses mises en abyme successives. S’instaure en sus un autre jeu, subtil et dérangeant, entre le lecteur et le narrateur tandis que l’énigmatique quête de Thomas, qui s’accompagne désormais d’un ardent désir de vengeance, se nourrit de la haine éprouvée pour tous les conformistes, une colère libératrice dirigée contre les enfants qui le martyrisaient et qui ont grandi maintenant : « tout leur est dû, ils se trouvent importants, drôles, spirituels, ils pensent que tout le monde rit de leurs blagues, ils pensent que même les tapettes rient de leurs blagues homophobes et les femmes de leurs blagues sexistes. »

    Cet étrange roman, dans lequel on entre sans se méfier, retranscrit habilement les hésitations d’une conscience qui ne sait quel chemin emprunter, entre le faire-semblant de l’enfance et le simulacre des adultes : le chemin de la réalité qu’imposent les autres ou bien celui de la réalité que l’on s’invente pour, justement, échapper aux autres et à l’uniformisation qui toujours guette.

     

    http://www.actes-sud.fr/index.htm

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  • Araluen 4

    araluen4.jpgà paraître en janvier

    L'Apprenti d'Araluen
    tome 4, Les Guerriers des Steppes
    de John Flanagan
    (traduction de l'anglais, Australie, B. Longre)
    Hachette roman jeunesse

    http://www.rangersapprentice.com/

    Le tome1, L'Ordre des Rôdeurs, paraît en Livre de poche jeunesse ce mois.

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  • Archivages... again.

    De "nouveaux" articles désormais en ligne sur la nouvelle version de sitartmag.

    colapinto3.jpgAbout the author, de John Colapinto - Fourth Estate, 2002

    Auteur en sursis - traduit de l’anglais par Cécile Arnaud - Belfond, 2003

     

    La poursuite de la célébrité peut se décliner de multiples façons, souvent sur le mode satirique. Avec About the author, les amateurs de suspense et d'humour trouveront leur compte, car ce premier roman (palpitant, admettons-le) ne manque pas d'efficacité (on serait tenté de dire "à l'américaine"). Mais sous des dehors de thriller littéraire un peu facile, le récit est avant tout une confession angoissée, écrite dans l'urgence par un homme qui a longtemps caché son jeu, et qui a donc beaucoup à nous apprendre : Cal Cunningham revient ainsi sur ses pas et raconte comment, fraîchement sorti de l'université, il s'installe à Manhattan dans l'espoir de devenir écrivain, mais surtout, "célèbre". LIRE LA SUITE

     

    kaikisen3.jpgKaikisen, retour vers la mer
    Satoshi KON
    - Casterman, collection Sakka, 2004

     

    S'inspirant d'une mythologie poétique qui prête à l'ondine (représentée ici sous les traits de la femme-poisson, telle que nous la connaissons) des pouvoirs sur la mer et ses créatures, Kaikisen se présente comme un manga émouvant, palpitant et engagé, dont l'action se déroule à Amidé, une petite ville côtière imaginée par l'auteur, et qui s'accroche à son passé tout en essayant de s'adapter à une modernité galopante, avec la promesse d'un essor économique sans précédent. L'histoire débute sur un œuf mystérieux dont Yôsuké, un jeune homme rêveur et respectueux des traditions, sera bientôt l'unique gardien, comme l'est encore son grand-père, prêtre Shintô. LIRE L'ARTICLE

    choe1.gifPoétique de la soif de Ch’oe Yun
    récits traduits du Coréen par l'auteure et Patrick Maurus - Actes Sud, 1999

    Dans cet ouvrage sont regroupés quatre récits écrits à différentes périodes, mais ayant pour dénominateur commun la Corée du "miracle économique" et les répercussions dévastatrices de ces changements sur l'individu et la société entière. Une tristesse ineffable semble adhérer aux êtres qui ont un profond sentiment de solitude dans des foules anonymes : ils intériorisent leurs émotions, ne parvenant pas à communiquer dans un monde clos et oppressant. Par bonheur, l'écriture ouvragée de Ch'oe Yun leur permet d'exister et de révéler leurs peurs et leurs rêves, leurs lâchetés et leurs courts bonheurs : une écriture alambiquée, une prose empreinte d'une poésie mouvementée qui illumine les récits. LIRE LA SUITE

    christophedufosse1.gifL'heure de la sortie de Christophe Dufossé
    Denoël, 2002 - Folio Gallimard, 2004

    Les enseignants seraient-ils des créatures à part ? A en croire Christophe Dufossé, ils formeraient une catégorie atypique, une espèce sclérosée et obnubilée par des relents d'enfance, et pourtant en tous points génétiquement semblables aux autres humains... C'est du moins le point de vue, non pas tant énoncé qu'esquissé, qui domine ce sombre roman. L'histoire est racontée par l'esprit en perdition d'un jeune professeur de français, Pierre Hoffman, qui porte un regard désabusé, cynique mais aussi très amusant sur la profession, une vision amère mais teintée de drôlerie du microcosme de la salle des profs de son collège : des descriptions et des remarques peu flatteuses qui sonnent juste de bout en bout, en dépit d'un penchant à noircir allègrement le tableau. LIRE LA SUITE

    charlesmasson3.jpgSoupe froide de Charles Masson
    Casterman, Écritures, 2003

    Quand frappe l'hiver, on a tous quelques pensées fugaces pour les plus démunis ; les journaux et les radios se chargent de nous le rappeler et entonnent une litanie (c'est la faute à la froidure...) qui, à force d'être répétée, perd de son sens et devient, comme beaucoup d'autres sujets, une façon de combler le vide. La mauvaise conscience refait surface, mais tout s'efface très vite des esprits qui habitent des corps à l'abri du froid, de la faim et de la déchéance. L'ouvrage de Charles Masson est exemplaire, car il force le lecteur à l'intimité d'un rude face à face... LIRE LA SUITE

     

    genevievebrisac6.jpgAngleterre, de Geneviève Brisac
    Médium de L’Ecole des Loisirs, 2005

     

    Les parents d’Adélaïde décident de l’envoyer en séjour linguistique sans l’avoir consultée au préalable (pour des raisons d'abord obscures), la toute jeune fille est révoltée – et se plie malgré tout à l’autorité parentale… Quand elle arrive en Angleterre, elle va de surprises en déconvenues, portant un regard critique sur tout et sur tous – transformant ainsi certaines scènes au demeurant banales en une comédie très acide : la famille d’accueil en prend pour son grade, mais les Français qui l’accompagnent aussi. LIRE LA SUITE

     

    deltenre1.jpgLa cérémonie des poupées de Chantal Deltenre - Maelström, 2005

    Tout fait sens dans ce palpitant roman, d’un bout à l’autre du récit de Keiko qui relate son séjour au Japon – un pays qu’elle ne connaissait pas en dépit de ses origines. Elle le découvre aux côtés de Pierre, son ami français que la langue et la culture japonaises fascinent. Cela fait maintenant un an qu’ils se sont installés dans un petit appartement, à Tokyo, un lieu que Keiko s’est approprié avec une férocité dont elle seule a conscience (« m’arracher à l’appartement m’est devenu aussi douloureux qu’une amputation »), sacralisant secrètement l’endroit et engageant, au quotidien, un dialogue muet avec les objets et les meubles qui étaient déjà là lors de leur emménagement... LIRE LA SUITE

    loupsarbacane3.jpgUn LOUP peut en cacher un autre
    collectif d'illustrateurs - textes de François David - Sarbacane, 2006

    Après l’éléphant, un animal autrement plus ambivalent a été retenu par les éditions Sarbacane pour ce deuxième album grand format, qui réunit une trentaine d’illustrateurs, et dont le fil conducteur est une nouvelle fois offert par François David et ses poèmes – en regard de chacune des créations graphiques. Un bel éventail, donc, qui permet à la fois de (re)découvrir des artistes et d’observer le loup à travers le prisme d’univers imaginaires forcément très hétérogènes. LIRE L'ARTICLE

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  • D'album en album

    Quelques albums dont je tâcherai de parler prochainement, mais dont je recommande d'emblée la lecture.

    Regarde !
    de Christine Beigel, illustré par Carole Giblas-Odin. - Mouton-Cerise, 2008

    Un Pantin
    M.P. Rivière et Elisabeth Brami - Océan jeunesse, 2008

    Catalogue de parents pour les enfants qui veulent en changer
    de Claude Ponti - Ecole des loisirs, 2008

    Au coin du fourneau
    d'Adrienne Barman, La Joie de lire, 2008

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     pantin.jpgcatalogueponti.jpgadrienne.jpg

     

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  • Harfang, revue de nouvelles

    Après un numéro centré sur Pierre Bordage, la revue Harfang, née en 1991 et dirigée par Joël Glaziou, poursuit sa route avec un numéro 33 paru en octobre dernier, consacré aux « prix de la nouvelle ». On y trouvera plusieurs textes, dont une énigmatique nouvelle de Marc Bernard (Quién sabe… ?), lauréat du prix de la nouvelle d’Angers 2008 (organisée par Harfang et l’association Nouvelles R) et une autre intitulée Contes d’auteur, signée Alain Kewes, qui relate une découverte littéraire de taille (doublée d’une aventure éditoriale fort ironique). On lira aussi des entretiens stimulants, dont l’un avec le même Alain Kewes, fondateur des éditions Rhubarbe. Ce dernier revient sur la genèse de sa maison d’édition et sur le premier texte publié (une délicieuse histoire en vers, du pur libertinage que je recommande vivement : Moi aussi), sur ses choix et les critères qui, pour lui, entrent en jeu, tout en précisant qu’il refuse de s’enfermer dans un genre spécifique et aime à publier également du « court hybride », des textes « qu’on range, faute de mieux, sous l’appellation ‘récit’, ‘carnet’ ou ‘prose courte’ », une façon « d’établir des ponts contre nature ».

     

    lire aussi

    La nouvelle de A à Z, ou troisième tour du monde de la nouvelle en langue française, de René Godenne - Editions Rhubarbe, 2008

     

    Et sur le genre et ses frontières.

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  • Quand Twain revisite le Paradis

    twain.gifLe blog du Visage Vert, loin d'être replié sur lui-même, propose quelques belles idées de lectures recensées ici, des ouvrages publiés par des éditeurs indépendants. On y trouve entre autres certains textes de Mark Twain, publiés par L'Oeil d'or.

    Lettres de la Terre, L'Oeil d'or, 2005 / Journal d'Adam et journal d'Ève, de Mark Twain
    L'Oeil d'or, 2004 -
    collection fictions & fantaisies - Traduction Freddy Michalski, ill. Sarah d'Haeyer
    The diary of Adam and Eve (Hesperus Press 2002)

    La véritable histoire d'Adam et Eve...

     

    Journal d'Adam et journal d'Ève réunit plusieurs textes peu connus de Mark Twain et dont les diverses publications s'étendaient jusqu'à lors de 1906 à 1962 en anglais. Tous ont en commun les deux ancêtres bibliques, revus et corrigés par le satiriste Twain, qui a imaginé les journaux intimes d'Adam et d'Eve, depuis leurs premiers jours au paradis jusqu'à leur chute, en passant par leur exploration de l'Eden et la découverte de l'arbre de la connaissance. En résulte une chronique à l'humour décapant, qui dérive en partie de la naïveté originelle des deux protagonistes et de la description de leurs tâtonnements intellectuels et empiriques, leurs conclusions (souvent erronées) et leurs questionnements sur le monde idyllique et totalement absurde dans lequel ils vivent : Eve s'étonne avec justesse qu'un tigre ou qu'un lion soit condamné à se nourrir de framboises ou de légumes, alors que leur mâchoire semble plutôt indiquer qu'ils sont destinés à être des carnivores... De même, Adam s'interroge sur l'origine de sa compagne, qui déclare avoir été créée à partir d'une de ses côtes, alors que ses côtes sont toujours bien en place... Celle qu'il nomme "la nouvelle créature" (en la gratifiant tout d'abord du pronom anglais "it", en lieu et place de "she") avec une pointe de misogynie (déjà !) l'agace par ses bavardages incessants et dérange sa solitude : elle le suit partout où il va, s'obstine à nommer les choses qu'ils rencontrent avant même que lui ait eu le temps de réfléchir à un nom... Twain accorde ainsi le pouvoir du verbe à Eve, qui pense que le mutisme d'Adam est dû au fait "que peut-être, il n'est pas très intelligent." Assurément, elle ne se trompe guère sur son compte, lui qui s'obstine à ne pas reconnaître ses propres enfants, les prenant d'abord pour de mystérieux poissons, puis des kangourous, et enfin des ours, pour enfin comprendre, bien des années plus tard, qu'ils sont des "garçons" ! Une façon d'insister sur l'ignorance crasse du premier homme mais aussi d'illustrer avec drôlerie les stades par lesquels passe chaque être humain, de la naissance à l'âge adulte.

    twain2.jpgL'humanité naissante selon Mark Twain peut se résumer ainsi : un homme peu curieux, acceptant son lot sans se poser trop de questions et déjà désireux d'éviter une compagne désignée par un créateur invisible, qui n'apparaît que sous forme de "voix" lointaine, (contrairement à Satan...) ; Eve est une femme active, impatiente de découvrir ce monde qu'elle explore sans relâche, charmante dans sa hâte à nommer tout ce qui croise son chemin et dans son entêtement à vouloir comprendre chaque phénomène (le feu, les étoiles ou l'instinct maternel...). Et pourtant, peu après la chute, Adam prend conscience de cette énergie bouillonnante et se dit qu'il pourrait en tirer profit (puisqu'il leur faudra maintenant travailler pour vivre...). Eve seule est consciente de la beauté qui les entoure (la femme est déjà poète, s'abreuvant de courtes phrases qu'elle compose spontanément), alors que son compagnon a une fâcheuse tendance à ne considérer les choses qu'à travers un prisme utilitariste...
    Ces textes amusants, subtils et semi-philosophiques abordent aussi des questions d'ordre générique et social, et, tout particulièrement, dénoncent en filigrane certains comportements typiquement masculins (qui auraient donc été véhiculés par la bible ?). Suivent quelques extraits "autobiographiques" de la main d'une Eve vieillie qui revient sur son "enfance" au paradis, se remémorant sa soif de savoir quand elle était encore une "scientifique", une rivale d'Adam et que tous deux recherchaient le sens du terme "mort" (bien entendu soufflé par le serpent ; Lettres de la Terre sont dédiées au "Journal de Satan"). Un autre passage ("Adam's soliloquy") voit Adam en visite au Musée d'histoire naturelle de New-York puis discutant avec une dame, l'une de ses descendantes, assise sur un banc...
    Dans cette « compilation», Twain joue (et se joue) des mythes bibliques et du conte de la genèse, tout en faisant montre d'un humour brillant : une relecture de la bible (et de ses incongruités, inhérentes à toute légende) particulièrement savoureuse et amorale, à la lumière des découvertes scientifiques de son temps, livrant de délicieux anachronismes darwiniens ou parsemant son Eden de quelques ptérodactyles ou autres brontosaures...

    (B. Longre)

     

    http://loeildor.free.fr/

     

    http://www.hesperuspress.com

     

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  • 2009

    Belle année 2009 à tous.

    (merci à mon amie liégeoise, Samia, pour cette carte lumineuse).

    henne.jpg

     

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  • Le bonheur est dans la forêt

    doppler3.jpgDoppler d'Erlend Loe
    traduit du norvégien par Jean-Baptiste Coursaud
    Gaïa, collection taille Unique, 2006 / parution en 10-18, janvier 2009

     

    Qui est réellement ce Doppler qui donne son nom au quatrième roman d’Erlend Loe publié en français et qui, soit dit en passant, nous fait tant rire ? Un irrécupérable ahuri ? Un asocial invétéré ? Ou tout simplement un sage, qui a bien raison de fuir travail, épouse et enfants, d’aller trouver refuge dans la forêt proche d’Oslo et d’adopter un jeune élan comme seul compagnon ? Certes, Doppler reconnaît ouvertement sa misanthropie en admettant ne pas aimer les gens (surtout les Norvégiens…) et son départ s’accorde à la logique jusqu’au-boutiste qu’il a décidé de suivre désormais. Avide de silence, il vit depuis six mois dans la forêt où il a planté sa tente dans un coin tranquille et érige petit à petit un système de valeurs dont le premier commandement est le suivant : fuir l’application humaine, qui caractérisait la vie étriquée qu’il menait avant, faite de petites obsessions matérielles et de préoccupations déshumanisantes, vécue au rythme des Teletubbies, héros de son fils téléphage, ou des élucubrations tolkieniennes de son adolescente de fille.

    Cette exclusion volontaire est le résultat d’un long processus mental, d’une crise existentielle qui ne fait que débuter, d’un dégoût progressif d’une vie sans joie, où le moindre geste était régi par un perfectionnisme effréné, où toujours il fallait prouver (à soi et aux autres) ses compétences : « Pendant des décennies, j’ai pataugé dans cette mare d’application (…) J’ai respiré de l’application et, peu à peu, j’ai perdu la vie. » Ainsi, pour faire contrepoids, Doppler a décidé de ne plus rien faire… ou presque ; de se prélasser sous sa tente ou près d’un feu de camp, de rêvasser ou de penser à son père, mort quelques mois plus tôt, se contentant de vivre de rapines, du troc ou de la chasse. Son élan et lui s’amusent comme des fous sous leur tente, mais il lui faut cependant se ravitailler de temps à autres – et malheureusement côtoyer brièvement quelques spécimens de l’espèce humaine. Et quand son épouse (qui est parfois venue lui rendre visite – Doppler est admirablement membré, il ne s’en cache pas !) lui annonce tout de go qu’elle est enceinte, lui pose un ultimatum, ou lui impose la garde partagée de Gregus, leur fils de quatre ans, comment va-t-il réagir ? Quand son ascétisme fera naître d’autres vocations, parviendra-t-il à échapper à ses pathétiques admirateurs ? Car en dépit de son entêtement et de tout ce qu’il peut affirmer sur sa détestation d’autrui, Doppler n’est pas un « méchant » ; ce serait presque tout le contraire... il se montre très attachant et s’attache lui-même aux autres, contre son gré. À l’instar de Jonathan Swift (“Je hais et je déteste cet animal qu'on appelle homme encore que je puisse aimer de tout mon coeur John, Peter, Thomas.»), c’est en groupe que Doppler déteste l’être humain.

     

    doppler1.jpgAu-delà du parcours singulier et atypique de Doppler, grand philosophe des temps modernes, sorte de Bouddha en quête d’un éveil improbable quittant la chaleur du foyer familial pour aller chercher ailleurs des questions et des réponses, et au-delà de la loufoquerie délibérée du récit, l’auteur expose en filigrane quelques maux qui frappent notre époque – consumérisme outrancier, accumulation de biens matériels, aveuglement des illusoires échappatoires qu’offrent la culture de masse et ses avatars - ou, tout simplement, la condition qui frappe l’humain en tant qu’être social.

    Au pragmatisme de son épouse, le narrateur oppose une logique qui n’appartient qu’à lui et quand la réalité cherche à le rattraper, il reste fidèle à lui-même, osant ce que jamais il n’aurait osé faire par le passé. Doppler est un personnage qui fait office de fou – au sens noble du terme : celui qui entend déciller les yeux du lecteur par sa posture extrême et sans compromis, et pourtant jamais morale, et dit tout haut ce que l’on n’ose même penser… Hormis ces salutaires réflexions que nous impose Doppler, le roman a le grand mérite de divertir le lecteur, page après page, de situations ubuesques en épisodes invraisemblables (quoique…), d’expériences malencontreuses en rebondissements inopinés. Erlend Loe a créé là une importante figure humanisante de la marge qu’on aura le bonheur de retrouver dans Volvo Trucks, paru il y a quelques mois.

     

    erlendloe.jpghttp://www.gaia-editions.com

     

    www.10-18.fr

     

     

    du même auteur :
    Autant en emporte la femme traduit du norvégien par Jean-Baptiste Coursaud - Gaïa, collection taille Unique 2005

    Maria & José (illustrations de Kim Hiorthøy) roman graphique traduit du norvégien par J-B. Coursaud - Gaïa 2005

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  • Anansi, l'homme-araignée

    anansi.jpgAnansi, conte africain / Figures futur 2008-2010
    Editions courtes et longues - CPLJ-93, ouvrage bilingue français-anglais, 2008

    Le Centre de promotion du livre de jeunesse Seine-Saint-Denis organise chaque année le salon du Livre et de la Presse jeunesse de Montreuil et, tous les deux ans (depuis 1990), un concours international : Figures futur, dont l’objectif est de repérer les grandes tendances de l’illustration de demain et de découvrir de nouveaux talents. Publié par les éditions Courtes et longues, ce bel ouvrage regroupe les contributions de plus d’une trentaine d’illustrateurs sélectionnés par le jury, dont la lauréate, Julia Marti, d’origine suisse – son trait économe et son dessin épuré ayant retenu l’attention des jurés. Cette fois, après Peter Pan et Alice (concours 2006), les candidats ont pu choisir entre deux contes africains : Pourquoi on trouve toujours les araignées aux coins des plafonds et Anansi et la Mort - qui mettent en scène le même personnage traditionnel, Anansi, mi-homme, mi-araignée, ambivalent et fluctuant. L'ensemble est forcément éclectique et très varié et, pour ma part, j'ai surtout apprécié les travaux de Katinka Reinke ou de Lisa Nanni (ci-dessous) dont les univers graphiques me semblent plus aboutis que d'autres.

    anansi2.jpgPour compléter le tout, plusieurs illustrateurs, peintres, artistes ou graphistes ont été interrogés sur ce que l’illustration représentait pour chacun d’eux - on retiendra entre autres les propos d'Olivier Douzou, fort justes : « l’illustration est une musique qui donne des inclinaisons à la parole. C’est un accompagnement qui joue finalement avec les mots, qui donne à lire plutôt qu’à voir, qui propose des interrogations plutôt que des réponses… »

    http://www.cleditions.com/

    http://www.salon-livre-presse-jeunesse.net/

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  • Une grande petite

    olga.jpgLe grand livre d'Olga, de Geneviève Brisac, illustrations Michel Gay - L'Ecole des loisirs, 2008

    Excellente idée que de rassembler les douze histoires d’Olga, la jeune héroïne imaginée par Geneviève Brisac il y a déjà quelques années (en 1990, pour être exact, date de sa première apparition dans la collection Mouche) dans un seul volume grand format d’une belle épaisseur, ponctué des esquisses de Michel Gay : pas moins de 420 pages d’aventures familiales qui mettent en scène une fillette, entre candeur et lucidité, toujours prompte à s’interroger et à enquêter (sur l’existence du Père Noël, dans Le Noël d’Olga), à remettre en question l’ordre des choses, à s’inquiéter de ce qui pourrait passer pour des broutilles aux yeux des adultes (quand il s’agit d’inviter des amies qui risquent de se moquer de sa maison « nid de souris », dans Olga fait une fête), ou à se révolter face à des injustices flagrantes – comme dans Olga et les traitres (où l’arrivée d'une remplaçante terrifiante incite certains enfants à céder à la peur), Chaque histoire dévoile habilement les appréhensions, les bonheurs et les difficultés qui font grandir, à travers les expériences quotidiennes d’une petite fille volontaire et attachante, dans une famille ou la liberté d’expression prévaut. 
    (Blandine Longre, décembre 2008)

    http://www.ecoledesloisirs.fr/index1.htm

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  • Chuchotements poétiques

    On m'a offert récemment un livre étonnant, forme et fond compris, une bien belle surprise dont j'ai envie de dire quelques mots. Un ouvrage à la couverture lumineuse (fond orange doré à la feuille d'or), composé d'une seule page, pliée de telle sorte qu'on obtient un livret en accordéon, maintenu par deux fins rubans noirs croisés de chaque côté. Selon le sens où l'on choisit d'ouvrir cet objet, plus petit qu'un livre de poche, on tombe sur le texte original anglais - enregistré en 1963 sur 12 disques avec la voix de son auteur, puis publié en 1970 en anglais et en allemand dans un ouvrage collectif auquel participaient plusieurs artistes - ou sur sa traduction en français, signée Anne-Marie Hui Bon Hoa.

    A l'intérieur, on découvre douze poèmes en vers libres, chacun correspondant à une date précise mais arbitraire (17 janvier, 17 février... jusqu'en décembre - le 17 janvier étant devenu, dès 1973, l'occasion d'un anniversaire de l'art, à l'initiative de l'auteur) et décrivant quelques gestes qui rapprochent les êtres humains de la création artistique - des gestes simples, presque naturels, évidents voire anodins, qui rappellent que l'art est à la portée de tous, qu'il suffit de s'ouvrir au monde environnant, de l'observer, de le faire sien : de plonger une éponge dans un seau d'eau, de lancer une balle dans les vagues, ou d'acheter un os... Le leitmotiv, "l'art est vivant", peut s'associer sans peine à un autre, qui apparaît en filigrane : "la poésie est vivante". Le livre s'intitule L'Histoire chuchotée de l'Art / Whispered Art History, et le poète s'appelle Robert Filliou.

    fillliou.jpg

    "Tout a commencé un 17 janvier, il y a un million d'années.
    Un homme s'empara d'une éponge et la plongea dans un seau d'eau.
    Le nom de cet homme n'est pas important.
    Il est mort, mais l'art est vivant.
    Pas besoin de noms dans cette histoire."

    La personne à qui je dois ce précieux cadeau m'en voudrait que je dévoile ici son identité ; cependant, il semble important de révéler que cet ouvrage a été déniché au salon de l'Autre livre, sur le stand d'un éditeur indépendant que je ne connaissais que de nom : Clémence Hiver éditions. Faute de trouver en ligne de plus amples informations sur cette petite maison créée il y a une vingtaine d'années, je reproduis ici la fiche que le salon propose sur son site.

    Clémence Hiver Editeur
    6 rue de la Planète BP 13 30610 Sauve
    Tel. : 04 66 77 02 09
    clemence.hiver(at)wanadoo.fr
    Autodiffusé, autodistribué 

    Ligne éditoriale : Les livres des éditions Clémence Hiver ont souvent été repérés pour leur facture singulière (maquettes, papiers, typographies, reliures), qui n’est peut-être que la forme d’un hommage tranquille à des univers poétiques, que l’éditeur a cœur à transmettre. En cela guidé non pas par une appartenance géographique ou autre des auteurs, mais par leur présence propre ; l’écriture restant première dans les choix éditoriaux : densité, résonances…

    Ouvrages principaux, collections : Marina Tsvetaeva, Terentiev (un compagnon de Malévitch) et son imbattable "Record de Tendresse", le désormais célèbre Nuvolaire de l’orientaliste florentin Fosco Maraini, le Pianissimo et les Copeaux de Camillo Sbarbaro, le Livre de Recettes de Ladislav Novak, les Contes de fées & 16 Poèmes enfantins du poète des Inconférences, E.E Cummings. Sans oublier L’histoire chuchotée de l’art d’un natif de Sauve : Robert Filliou (“Nationalité : Poète. Profession : Français”, selon son passeport).

    Nouveautés : Les deux « voyages métaphysiques » d’Olga Sedakova, l'une des grandes voix de la poésie russe contemporaine / Voyage à Tartu & Retour (Chronique à retardement) suivi de Poésie & Anthropologie et de Quelques remarques sur l’art de la traduction/Voyage à Briansk (Chronique sans prétention) suivi par Le Don de la liberté et de Quelques mots sur la poésie. Sur sa fin, son commencement et sa continuation.

     

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  • Abrutissement généralisé

    debris.jpgDébris, de Dennis Kelly

    traduit de l’anglais par  Philippe Le Moine et Pauline Sales

    Editions théâtrales, Culturesfrance, collection Traits d'union, 2008

     

    « Pauvre maman. Elle n’avait pas compris que les gens dans le poste ne sont pas réels, ce n’est qu’un écran magique, les mots ne sont plus qu’une collection chaque jour plus abstraite de sons dans les airs. La réalité était bel et bien dans son ventre, la réalité grandissait là, c’était moi la réalité. Une enfant-plante suçant la mort par sa langue-pomme de terre – c’était ça la réalité. »

     

    Texte saisissant, Débris traite de la déliquescence familiale, sociale et humaine et examine avec acuité la manière dont les rapports (de force ou d'amour) entre les générations évoluent, corrompus par l’incommunicabilité, elle-même engendrée par la télévision, omniprésente : un mal déréalisant qui provoque la perte des repères, du sens et pire encore. Il s’agit là d’un théâtre essentiellement allégorique, où l’horreur des situations exposées sert avant tout à mettre l’accent sur les dysfonctionnements qui agitent les rapports humains, en particulier la relation parent-enfant.

     

    Ainsi, l’abandon du père par le fils dans la première scène, où l’inversion des rôles est amplifiée par le recours au symbolisme religieux : quand Michaël, 16 ans, assiste à la crucifixion volontaire de son père, puis quitte la pièce, laissant son père mourant, terrifié. Plus loin, on voit le même Michaël, enfant, devenir le père d’un bébé abandonné dans les ordures, qu’il baptise « Débris », et qu’il nourrira au sein ; ailleurs, Michaël et sa sœur Michelle tombent entre les mains avides d’un proxénète et se seraient pliés à ses exigences si leur père, éprouvant soudain un attachement animal pour sa progéniture, n’était pas venu les récupérer - même si, à d’autres occasions, les enfants sont niés, oubliés et que c’est l’abandon parental qui prime.

     

    La plupart des scènes, monologues ou duos, reposent sur un procédé similaire : des images successives visuellement frappantes, voire grotesques, des mots qui font mouche, implacables mais jamais gratuits, qui atteignent le monstrueux et l’impensable, et dont l’impact sur le lecteur/spectateur pourrait se rapprocher du théâtre brechtien, dans la mesure où ils cherchent aussi à déciller, à éveiller les consciences abruties ou en passe de l’être… L’auteur bâtit une vision décadente, pitoyable et noire de la petite humanité et de ses débris, comme une tentative de briser les cercles de la transmission intergénérationnelle et de la démission existentielle.
    (B. Longre, décembre 2008)

     

     

    ***********

     

    Dans le cadre de la Saison culturelle européenne (juillet – décembre 2008), les éditions Théâtrales et Culturesfrance coéditent une collection intitulée "Traits d'union", regroupant 27 pièces inédites, une pour chacun des pays européens, de l'Allemagne à la Suède.

     

    www.editionstheatrales.fr/traitsdunion

     

    http://www.editionstheatrales.fr/

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  • Une femme disparaît

    barbebleue.jpgBarbe-Bleue de Chiarra Carrer, La Joie de Lire, 2008 (traduit de l'italien)

    Une hache.
    Une cuve.
    Une mare de sang épaissi.

    Réinvention partielle du célèbre conte, cet album minimaliste marque l'esprit du lecteur : texte contenu, en vers libres, où les non-dits abondent ; illustrations en beige, noir, bleu ou jaune pâle, ponctuées de quelques traces rouge sang. L'horreur et l'angoisse sont présentes à chaque page, tantôt brutes, que ce soit verbalement ou visuellement, tantôt suggérées par l'expressivité d'un visage, la position d'un corps, ou quelques mots qui laissent l'imaginaire faire le reste. Un beau travail d'artiste, glaçant à souhait, qui rend hommage au conte et à ses aspects symboliques mais qui en propose aussi une vision singulière, quasiment théâtrale.

    On pourra lire la chronique d'Anne-Marie Mercier.

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  • Un peu de lecture

    book2.jpgÀ découvrir, entre autres, dans le Zaporogue Magazine n° 5, revue de littérature, un texte intitulé " Dernier séjour ".

    Lien direct: http://www.lulu.com/content/5336540

    À télécharger gratuitement ou à acheter en ligne
    - édité par Sébastien Doubinsky, éditions du Zaporogue
    http://www.myspace.com/zaporogue

    Merci de vos lectures.
    Belles fêtes à tous.

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  • Des blogs pour (mieux) passer l'hiver

    Quelques suggestions, liste non-exhaustive... (les liens ne sont plus mis à jour très régulièrement dans la colonne de gauche - mais plutôt de ce côté.)

    Ailleurs ici presque sans sommeil - Veille internet hautement subjective de Romain Verger.

    http://ailleursicipresquesanssoleil.tumblr.com/

    Livrenblog - Littérature fin de siècle. Textes et images. bibliographies, portraits littéraires, informations.

    http://livrenblog.blogspot.com/

     Solko - Littérature, théâtre, histoire et polémiques à Lyon et ailleurs ... Blog de Roland Thevenet

    http://solko.hautetfort.com/

    Locus Solus - Le blog de Thierry Horguelin - Littérature, Cinéma, Typographie

    http://locus-solus-fr.net/

    Au Carrefour étrange - Trouvailles et introuvables

    http://aucarrefouretrange.blogspot.com/

    Bartleby les yeux ouverts - Des livres et des livres : études de personnages, de situations, etc. à la marge, en décalage avec la réalité quotidienne.

    http://bartlebylesyeuxouverts.blogspot.com/

    Littératures orientales, questions de traduction

    http://jelct.blogspot.com/ 

    Mister M.

    http://print-temps.over-blog.com/

     Le Tampographe Sardon

    http://le-tampographe-sardon.blogspot.com/

    Morbid anatomy

    http://morbidanatomy.blogspot.com/

     A journey round my skull -  Unhealthy book fetishism from a reader, collector, and amateur historian of forgotten literature.

     http://ajourneyroundmyskull.blogspot.com/

    Adventures in the print trade

    http://adventuresintheprinttrade.blogspot.com/

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  • La pomme de la discorde, les ailes de l'avenir

    The Three Incestuous Sisters, d'Audrey Niffenegger
    Jonathan Cape, 2005

    sisters1.jpg

     

    L'album n'est pas réservé aux seuls enfants et Audrey Niffenegger s'est approprié ce support avec finesse et talent ; de même, elle a choisi de créer un conte tendre et cruel – le merveilleux n'étant pas non plus une exclusivité enfantine. The Three Incestuous Sisters n'est pas un ouvrage pour la jeunesse, le titre en atteste, quand bien même le récit débuterait par le très classique "Il était une fois trois sœurs...". Trois sœurs, donc, qui ne se ressemblent pas - Clothilde, la talentueuse, Ophile la plus intelligente et Bettine, la plus jolie. Elles vivent en bonne entente jusqu'à l'arrivée d'un garçon nommé Paris - incarnation de la discorde à venir. Le choix du garçon se porte sur Bettine, la benjamine, et tandis que la fantasque Clothilde s'enferme dans un monde de folie douce tout en restant attentive aux étreintes de Bettine et de Paris, le cœur d'Ophile est noirci par la jalousie.

    Les deux amoureux apprennent à se connaître et un enfant est conçu - un fœtus avec lequel Clothilde communique tendrement, lui enseignant les étoiles et les sciences, en lui apprenant aussi à voler... Mais la sombre douleur qui ronge Ophile l'incite à commettre l'irréparable : Bettine meurt et Paris s'enfuit ; quant au fœtus... Clothilde a cessé d'entendre sa voix. Ophile, dont l'existence est devenue un calvaire saturé de fantômes, met fin à ses jours. Clothilde, restée seule dans la grande maison, se languit du bébé de sa sœur, quand, bien des années plus tard, elle entend à nouveau sa voix.

     

    sisters3.jpgLes trois sœurs sont des êtres hybrides, tour à tour fées, déesses, sorcières ou simples mortelles dont les sentiments se mêlent - rendant l'histoire de chacune indissociable de celle des deux autres, tandis que que toutes trois convoitent le même homme. Des histoires de séparations, d'amour et de mort, puis de retrouvailles, au-delà de la mort, dans un happy end qui remet en mémoire certains passages du roman d'Audrey Niffenegger, The Time Traveler's Wife.

    Le texte, délibérément bref et incisif, se superpose habilement aux illustrations, parfois à la manière d'une légende qui les accompagnerait humblement. Car l'artiste a d'abord composé cette histoire visuellement, à la façon d'un story-board, et le récit fut écrit postérieurement, à partir des esquisses. "C'est mon livre de cœur, un travail amoureux de quatorze années." explique-t-elle en postface, ajoutant qu'elle préfère le qualificatif de "visuel" plutôt que celui de "graphique" pour ce roman atypique.

     

    D'instinct, le lecteur est aspiré par les quelque quatre-vingt gravures (pas moins) qui composent l'ouvrage - des aquatintes homogènes, dans les tons de gris pour les décors, les personnages, en particulier les visages, se détachant ainsi singulièrement. Des illustrations pleine page, qui peuvent aussi se lire indépendamment du texte, ceci permettant de donner libre cours à sa propre imagination. Ce travail assidu, que l'auteure compare "au long siège d'une forteresse" - mûri avec le temps et patiné par l'acide mordant le cuivre - fut d'abord purement artisanal, Audrey Niffenegger ne prévoyant de réaliser, à la main, que dix exemplaires. Cette parution, par nécessité "industrielle", demeure esthétiquement exemplaire (et entre dans la belle collection graphique de l'éditeur Jonathan Cape), un "beau livre" dont le récit illustré et les trois sœurs aux longs cheveux reviennent inlassablement hanter le lecteur.  (B. Longre)

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  • Dystopie à l'anglaise

    robincook3.jpgQuelque chose de pourri au royaume d'Angleterre
    de Robin Cook
    (A State of Denmark, 1970) - traduit de l'anglais par Jean-Paul Gratias - Rivages/Noir

     

    D'abord, il serait dommage de confondre Robin Cook, auteur en série de thrillers médicaux de piètre qualité et Robin Cook (1931-1994), plus connu sous le nom de plume de Raymond Derek. Ce dernier, issu de la bourgeoisie britannique, prend vite la fuite et se met à voyager (Paris, New York, Espagne, Italie), alternant les petits boulots dans le monde interlope, les mariages et l'écriture : des nouvelles, une autobiographie (Mémoire vive), plusieurs romans parus en France aux éditions Rivages (Crème anglaise, Vices privés, vertus publiques, Il est mort les yeux ouverts, Comment vivent les morts, J'étais Dora Suarez...).

     

    L'oeuvre de Cook s'inscrit dans le mouvement engagé du néo-polar (romans noirs dont les aspects ouvertement militants offrent un regard critique sur les dysfonctionnements sociaux, politiques ou économiques - en France, les représentants les plus connus sont Jean Vautrin, Jean-Patrick Manchette ou encore Didier Daeninckx), et il exploite ici les tares et les défaillances d'un occident démocratique pour construire un roman dont la noirceur n'a d'égal que la superbe construction dramatique. La tragédie individuelle de Richard Watt, narrateur du palpitant Quelque chose de pourri au royaume d'Angleterre, s'apparente à (et s'inspire largement de) celle de Winston dans 1984 et la politique de Jobling (premier ministre élu démocratiquement pour mieux imposer sa loi par la suite) ressemble à s'y méprendre à celle d'un petit Hitler à la sauce Big Brother : l'Angleterre totalitaire qui est ici décrite est absolument terrifiante - mais, en définitive, pas plus que l'Allemagne des années 30 ne devait l'être : suppression des libertés individuelles, main mise sur les médias, délations, police secrète, détentions illégales des opposants, déportation des Noirs...

     

    Richard, journaliste conspué par le nouveau régime, s'est échappé à temps de cet univers cauchemardesque et mène, avec sa compagne Magda, une existence paisible en Toscane, où il a acheté des terres et une ferme, pour devenir vigneron. En cinq ans, ils se sont adaptés à leur nouvel environnement ; Richard est néanmoins tourmenté, l'esprit aux aguets, craignant de ne pas être véritablement à l'abri de Jobling dans cette campagne pourtant reculée, dans une Italie démocratique... Il craint d'être rattrapé d'une manière ou d'une autre, sans pourtant deviner ce qui l'attend.

    Roman d'anticipation politique laconiquement dédié "à toutes les victimes", Quelque chose de pourri au royaume d'Angleterre relate la chute inexorable d'un esprit rebelle, rageur, attaché à ses droits fondamentaux, et pourtant profondément pessimiste ; son parcours est une fable essentielle qui démantèle l'architecture dictatoriale et examine avec précision les effets que le contrôle totalitaire engendre au niveau individuel (éveil des instincts meurtriers, folie) : une œuvre obscure mais saisissante qui opère comme un avertissement : nul ne devrait se croire à l'abri...  (B. Longre)

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  • Zaporoguons - suite...

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    LE MAGAZINE "LE ZAPOROGUE" #5 EST SORTI
    "THE ZAPOROGUE" MAGAZINE ISSUE #5 IS OUT NOW

     

    Textes et images de/Texts and images by: Thibault de Vivies, Didier Dæninckx, Jean-Yves Lemesle, Lynn Hoggatt, Kim « Kix» Jeppesen, Sébastien Doubinsky, Michel Embareck, Jonas Lautrop, Michael Moorcock, Tabish Khair, Jean-François Mariotti, Hélène Dassavray, Métie Navajo, Pierre Cherruau, La bande des 4 (Doubinsky, de Vivies, Mariotti, Sendek), Zach Seemayer, Claro, Nicolas Richard, Eric Coulaud, Lionel Osztean, Alexandre Planque, Blandine Longre, Arlene Colombe, Hiquily Ole Wesenberg, Nielsen Johannes Høje, Cathy Ytak, Manu Rich, Celina Osuna, Matt Gangi.

     

     

    Lien direct: http://www.lulu.com/content/5336540

    À télécharger gratuitement ou à acheter en ligne.

     

    – édité par Sébastien Doubinsky, éditions du zaporogue

    http://www.myspace.com/zaporogue

     

     

    Lire aussi l'entretien que La Revue des ressources a accordé à Sébastien Doubinsky
    http://www.larevuedesressources.org/spip.php?article1043

     

     

    Et la présentation de quelques publications, vivement recommandées.

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  • Pour une autre exploration de l'espace du livre

    lesgrandsarbres.jpgLa Diseuse, association de micro-édition co-dirigée par Marc Bellini et Lilas Seewald, propose d’aborder le livre et la lecture autrement… en publiant des livres-objets, en mettant en place des collaborations parfois inattendues entre auteurs, dessinateurs, artistes, en mettant aussi l’accent sur l’innovation graphique.
    J’ai récemment découvert quelques-uns de leurs ouvrages, dont une série de quinze cartes postales intitulée Les grands Arbres, qui combine des textes d’Anne Vauclair et des photographies de Marc Bellini, dont le travail inclut un usage original du photomaton. Malgré son support singulier et les blancs du récit, il s’agit bien d’un roman, entre anticipation et introspection : l’histoire d’une rencontre amoureuse ou amicale bâtie autour d’un souvenir commun, pourtant vécu séparément : celui des grands arbres que les deux personnages grimpaient à l’insu de tous, quand ils étaient enfants. Un acte qui leur paraît à présent terrifiant, alors que d’autres terreurs surgissent dans leur existence – des peurs, des révoltes puis la disparition brutale de l’un d’eux.
    L’ordre de lecture est balisé (les cartes sont datées du 1er au 15 avril 2005), mais peut aussi se faire aléatoire et morcelé, opérant un basculement et une perte des repères temporels (on notera l’allusion à L’Intemporel), tandis que des parallèles prennent imperceptiblement forme entre textes et images ou entre les différents montages photographiques – visages, fragments de corps, poings levés, mains tâtonnantes – qui déconstruisent les gestes et insistent, via les cadres, sur ce qui sépare les êtres les uns des autres. Ce « livre », qui stimule autant les sens et les émotions que l’intellect, renvoie ainsi le lecteur à ses propres expériences ; un effet de rapprochement favorisé par le support, qui crée une intimité immédiate – comme si chaque missive nous était adressée. Une collaboration à saluer.

     

    Les Grands Arbres, d’Anne Vauclair et Marc Bellini, un roman photo (photographies d'identité) en 15 cartes postales. 10.5 x 15, 15 cartes retenues par une bague, imprimées en quadrichromie offset sur couché semi-mat. 400 exemplaires, 12 euros.

    http://www.ladiseuse.com

     

    La Diseuse est invitée par la Librairie éphémère (Halle Saint-Pierre, Paris) - jusqu'au 4 janvier 2009.

    http://www.hallesaintpierre.org 

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  • Le VV sur les ondes...

    livre_l_524.jpg

    L'émission Mauvais genres, ce samedi 13 décembre de 21 à 22 heures sur France Culture, sera consacrée à Gaston Leroux, Fu Manchu... et à la revue Le Visage vert. Avec la participation d'Anne-Sylvie Homassel (membre de la rédaction du Visage vert et traductrice des aventures de Fu Manchu chez Zulma).

     

    Le numéro 15 du Visage Vert est en cours de lecture de mon côté, et j'y ai déjà découvert quelques auteurs dont les histoires, pour la plupart glaçantes, sont à leur place dans cette parution intitulée "Hantises et malédictions".

    On lira entre autres Le Succube de Jules Bois (1868-1943), où libido et mortido sont indissociables. Bois, ami de Huysmans, journaliste, féministe, versé dans l'occultisme, y relate comment la victime masculine, peu à peu, se laisse posséder par le démon qui a pris les traits de sa compagne décédée ; et le récit se fait plus décousu, le style plus saccadé à mesure que le narrateur bascule dans un état fébrile, engendré par ses terreurs...

    D'autres scènes propres à générer quelques plaisants cauchemars composent N° 252, rue Monsieur-le-Prince de Ralph Adams Cram (auquel Michel Meurger consacre un dossier stimulant), une histoire de fantôme (et de maison hantée) atypique, aux révélations imprévisibles ; tout comme La vallée morte, du même auteur, au début de laquelle le narrateur nous met en garde : "des histoires qui deviennent, alors que la nuit court à son plus profond, et que le feu s'affaisse, de plus en plus étranges, de moins en moins crédibles ; mais je les tiens, moi, pour vraies." Une façon de souligner le pacte narratif qui s'instaure entre l'auteur et son lecteur, invité à jouer le jeu et à entrer dans des mondes imaginaires oppressants - pourtant fort vraisemblables...

     

    On lira aussi les autres nouvelles qui composent ce numéro,  signées Jean Cassou (avec un dossier d'Eric Vauthier), Leopoldo Lugones, Anne-Sylvie Salzman, Norbert Sevestre, etc.

     

    Le Visage Vert, revue de littérature, n° 15 (éditions Zulma, responsable de la rédaction : Xavier Legrand-Ferronnière)

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  • Un roman noir, blanc et gris

    kirikonananan.jpgBlue, de Kiriko Nananan
    traduit du japonais par Corinne Quentin
    Casterman, collection Ecritures (réédition), 2008

     

    Épure : tel est le terme qui vient à l'esprit lorsqu'on découvre la grâce suggérée des visages et la finesse du trait de Kiriko Nananan ; une sobriété de surface, accentuée par les uniformes scolaires que portent les jeunes protagonistes, et qui dissimulerait presque la sourde violence sentimentale qui agite Kayako. La lycéenne ne s'intéresse pas vraiment aux garçons et, dès la rentrée, semble comme fascinée par Endô, une camarade de classe énigmatique qui a été renvoyée de l'établissement l'année précédente et qu'elle retrouve maintenant. L'amitié profonde qui réunit les deux jeunes filles se métamorphose peu à peu en passion, un amour qui semble réciproque jusqu'au jour où l'amie de Kayako disparaît : une perte qui la trouble amèrement.

     

    Ce récit d'apprentissage amoureux frappe par son ascétisme graphique, en discordance avec les passions et les amitiés qui se nouent et se dénouent, au fil d'une histoire où il se passe tant et si peu à la fois ; les amours clandestines d'Endô et Kayako sont illustrées avec pudeur et tranquillité, malgré un ton dont la gravité ne sied habituellement pas à la tranche d'âge évoquée ; la sensualité y est douce et se heurte à l'ampleur des sentiments éprouvés et l'auteure a mis en place un équilibre fragile, à l'image des aventures de ces jeunes filles, entre enfance et âge adulte. (B. Longre)

     

    Cet ouvrage a paru précédemment dans la collection Sakka, chez le même éditeur.

     

    http://bd.casterman.com/

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  • Maléfiques ?

    sorcieres.jpgLes sorcières sont à l'honneur dans trois ouvrages parus récemment, d'abord sous forme de glossaire poétique dans Les Sorcières d'Elisabeth Brami (accompagnée de trois illustrateurs, Arthur Leboeuf, Amélie Jackowski et Brigitte Susini) : d'Abracadabra à Zibeline (en passant par chaudron, vipère, incantations, pustules ou bosse), chaque terme est défini par un court poème en rimes, drôle et léger, auquel est associé une brève explication étymologique. Un bel album grand format qui permet de présenter ces dames sous un jour sinon favorable, du moins largement sympathique.

     

    Sur le même thème, dans un format similaire mais dans une autre veine graphique et narrative, on ira découvrir un coffret comprenant un album de Benjamin Lacombe et Sébastien Perez, La petite sorcière, ainsi qu’un Grimoire de Sorcières (signé des mêmes), qui accompagne la lecture de l’album. L’histoire est celle de Lisbeth, qui découvre sa vraie nature lors d’un séjour chez sa grand-mère Olga. À cette occasion, elle trouve aussi un vieux grimoire, qui relate la généalogie et les parcours de plusieurs sorcières – ou plus précisément, de femmes considérées (par les hommes et la société) comme maléfiques au fil de l’histoire, en commençant par Lilith, l’ancêtre de toutes les autres. Suivent Isis, Méduse, Yama Uba (terrible dévoreuse d’hommes...), Gretchen, ou encore les siamoises Mary et Anny. Un beau livre peuplé de portraits en couleurs et agrémenté de documents inventés, de photographies ou de reliques très particulières.

     

    ptesorciere.jpgLes Sorcières d'Elisabeth Brami
    illustrations : Arthur Leboeuf, Amélie Jackowski et Brigitte Susini

    Hachette jeunesse, 2008

     

    Généalogie d’une sorcière
    (coffret contenant un album et un grimoire)
    de Benjamin Lacombe et Sébastien Perez
    Seuil jeunesse, 2008

     

    Pour découvrir d’autres sorcières : une visite du blog de Caroline Scandale s'impose.

     

    http://www.benjaminlacombe.com/

     

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  • Brèves, anthologie permanente de la nouvelle

    arton3162.jpgParution du dernier numéro de la revue Brèves (n°86)

    Avec des nouvelles inédites de Tadeuz Rozewicz (Traduit du Polonais) Jean-Claude Guillon, Dieter P. Meier-Lenz (Traduit De l’allemand) Isabelle Milkoff, François Teyssandier, Michel Wallon, Stephane Bonnefoi, Richard Huitorel, Anne Banville, Samuel Ico, Irene Duboeuf, Thomas Vinau, Michel Lamart, Chris Simon

    L’invité du numéro : le peintre SERGE KANTOROWICZ

    Pour en savoir plus sur la revue

    et sur ce blog

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  • Sélection 2008

    revue243.jpgLe numéro 243 de la Revue des livres pour enfants (La Joie par les livres / BNF, décembre 2008) vient de paraître : un numéro spécial qui propose, comme chaque année à cette période, une sélection d'ouvrages choisis parmi les nouveautés éditées de septembre 2007 à septembre 2008 - un choix de plus de 800 titres...
    Livres illustrés, contes, romans, poésie, théâtre, BD, documentaires, chansons, multimédia, magazines, etc.

    Articles consultables en ligne.

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  • Deux femmes et un renard

    dhlawrence3.jpgThe Fox, D.H. Lawrence
    Hesperus Press, 2002

    Deux jeunes femmes indépendantes, Banford et March, vivotent dans une petite ferme qu'elles ne parviennent pas à faire prospérer. Les deux amies s'entendent bien, en dépit de personnalités fort différentes — March est robuste et rêveuse, Banford plus fragile et pragmatique. Mais quand un soir, surgit dans leur vie un jeune soldat de retour de la première guerre mondiale (la ferme avait appartenu à son grand-père), cette harmonie se fragmente définitivement. Banford est d'abord heureuse de la présence du garçon et l'accueille fraternellement. Henry, c'est son nom, accepte leur hospitalité et se met en tête d'épouser March, malgré leur différence d'âge, d'abord par calcul, puis par désir. Cette dernière est comme hypnotisée par le garçon et, en sa présence, il lui semble qu'elle est privée de toute volonté. Cette fascination agace Banford qui, à son tour, irrite le garçon.

    Le sentiment d'irréalité qui envahit March dès qu'elle est avec Henry est complexe et indicible mais, sans équivoque, est lié au regard d'un animal : un renard qui emporte régulièrement les poules des deux jeunes femmes, sans qu'elles puissent jamais le tuer : un véritable "démon" qui, un jour, a croisé le regard de March et l'a ensorcelée ; comme si ce regard "avait pénétré dans son cerveau (...) Elle le sentait, invisible, prendre possession de son esprit." ; l'animal incarne ici la puissance rusée du mâle à l'affût, ne se laissant jamais prendre aux pièges tendus par la femme... Doris Lessing, qui signe l'avant-propos de ce court roman typiquement lawrencien, dit elle aussi avoir été "séduite" par le pouvoir d'évocation de l'écrivain, dès ses premières lectures, mais explique aussi qu'elle "a résisté au message de l'homme." Il est vrai que la plupart des écrits de D.H. Lawrence contiennent la même quête de domination masculine prononcée. Banford et March veulent leur indépendance mais leur ferme périclite et l'arrivée du jeune homme impudent, qui s'est glissé chez elles à la manière furtive d'un animal, est en quelque sorte l'incarnation de tout ce à quoi les jeunes femmes refusent habituellement de se plier.

    Ce texte est imprégné d'une sourde tension, toute nouvelle pour l'époque, mais récurrente dans l'oeuvre de l'écrivain : entre un féminisme naissant qui ne se formule pas encore ouvertement et le désir instinctif de possession des hommes, désir qui pousse Henry à vouloir une femme totalement passive, privée de toute volonté ; March le sent et n'est pas heureuse tandis que Henry "attend qu'elle se rende", qu'elle ne soit "plus l'homme, une femme indépendante avec des responsabilités d'homme" mais une simple femme. Cette vision phallocentrique du monde est pourtant contrebalancée par une écriture minutieuse et poétique, une atmosphère parfois quasi irréelle et une sensibilité exacerbée que reflète la complexité psychologique des personnages, en particulier celle des femmes, et qui fascine encore aujourd'hui.

    (B. Longre)

    http://www.hesperuspress.com

    Sans rapport avec DH Lawrence (ou à peine...), on pourra admirer quelques goupils de ce côté.

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