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contes

  • Blanche-Neige - Robert Walser

     

    La Reine (à Blanche-Neige) :

    Non, c'est faux. Tu te mens, et forges

    toi-même un conte. Mais le conte

    le dit : moi, la Reine mauvaise,

    je t'ai envoyé le chasseur,

    et donné la pomme à manger.

    Réponds clairement là-dessus.

    Tu ne fais que railler, pas vrai,

    en implorant mon pardon. Rien

    que gestes, façons étudiées, 

    paroles d'un rôle astucieux.

    Méfiante, en effet, c'est ainsi

    que tu m'as rendue. Que fais-tu ?

     

    Blanche-Neige
    Robert Walser
    traduit par Hans Hartje et Claude Mouchard
    édition bilingue
    dossier complémentaire établi par Fabienne Raphoz-Fillaudeau :avatars de Blanche-Neige
    Collection Merveilleux N°18
    José Corti, 2006

    BlancheNeige.jpg

    http://www.jose-corti.fr/titresmerveilleux/blanche-neige.html

     

     

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  • Anansi, l'homme-araignée

    anansi.jpgAnansi, conte africain / Figures futur 2008-2010
    Editions courtes et longues - CPLJ-93, ouvrage bilingue français-anglais, 2008

    Le Centre de promotion du livre de jeunesse Seine-Saint-Denis organise chaque année le salon du Livre et de la Presse jeunesse de Montreuil et, tous les deux ans (depuis 1990), un concours international : Figures futur, dont l’objectif est de repérer les grandes tendances de l’illustration de demain et de découvrir de nouveaux talents. Publié par les éditions Courtes et longues, ce bel ouvrage regroupe les contributions de plus d’une trentaine d’illustrateurs sélectionnés par le jury, dont la lauréate, Julia Marti, d’origine suisse – son trait économe et son dessin épuré ayant retenu l’attention des jurés. Cette fois, après Peter Pan et Alice (concours 2006), les candidats ont pu choisir entre deux contes africains : Pourquoi on trouve toujours les araignées aux coins des plafonds et Anansi et la Mort - qui mettent en scène le même personnage traditionnel, Anansi, mi-homme, mi-araignée, ambivalent et fluctuant. L'ensemble est forcément éclectique et très varié et, pour ma part, j'ai surtout apprécié les travaux de Katinka Reinke ou de Lisa Nanni (ci-dessous) dont les univers graphiques me semblent plus aboutis que d'autres.

    anansi2.jpgPour compléter le tout, plusieurs illustrateurs, peintres, artistes ou graphistes ont été interrogés sur ce que l’illustration représentait pour chacun d’eux - on retiendra entre autres les propos d'Olivier Douzou, fort justes : « l’illustration est une musique qui donne des inclinaisons à la parole. C’est un accompagnement qui joue finalement avec les mots, qui donne à lire plutôt qu’à voir, qui propose des interrogations plutôt que des réponses… »

    http://www.cleditions.com/

    http://www.salon-livre-presse-jeunesse.net/

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  • Trouver sa langue

    ptesirene3.jpgLa petite sirène de Myriam Mallié, Illustrations Alexandra Duprez - éditions Esperluète

     

     

    « Ce conte a hanté, et enchanté, mon enfance. Mais le personnage de la sorcière qui arrache la langue de la petite sirène en échange de jambes de femmes m’a autant fascinée que terrifiée », écrit Myriam Mallié en introduction à ce texte dense et envoutant. Aussi, a-t-elle décidé de donner la parole à la « Mutilante », celle qui tranche la langue. D’un point de vue symbolique, cette mutilation peut faire l’objet de plusieurs interprétations, mais l’auteure part de l’idée qu’en devenant femme et en quittant son royaume marin natal, la mer maternelle, la jeune fille en exil sur terre perd sa « langue maternelle », qu’elle n’aura de cesse que de retrouver, à moins d’en inventer une autre, tiraillée entre deux mondes, entre l’enfance et l’amour éprouvé pour un homme ; un désir envahissant, qui s’impose à elle : « Le désir n’est pas la conscience. Le désir est un ordre issu brutalement du fond qui vous retient », lui dit la Mutilante, qui n’a rien de maléfique dans cette réinvention. Au contraire, malgré sa lucidité, la sorcière, figure de la mère, se fait très maternante, surveille sa protégée par la pensée, suit son parcours en s’identifiant à elle. Un parcours semé d’embûches, car la sirène a voulu « franchir la frontière » qui sépare l’enfance de l’âge adulte, coupure qui « veut s’inscrire dans la chair » par le biais des jambes ; en sacrifiant la queue de poisson qui la retenait en enfance, en recevant aussi un « sexe, lumineux et fendu », elle se met en route sur la voie de l’émancipation et de la jouissance possible, un affranchissement difficile à assumer, quand, étrangère aux yeux de tous, elle ne saura se faire entendre de celui qu’elle aime. Car où trouver les mots ? « Pour trouver sa place, d’abord s’occuper de trouver sa langue », lui conseille alors la Mutilante, pour qui « la parole est le territoire » - celui de la sirène, mais aussi de chacun de nous, du lecteur comme de l’auteure.

    À partir d’un conte d’Andersen qui, comme de nombreux autres, se voit souvent édulcoré et ainsi privé de sens, l’auteure substitue sa propre vision et tisse une variation entêtante, où les symboles et les métaphores textuelles, réinterprétés visuellement à travers les peintures en noir et blanc, presque surréalistes, d'Alexandra Duprez, s’entrelacent sans relâche : un écheveau entre poésie et conte moderne, cruel et émouvant, qui parle à notre inconscient et explore tous les paradoxes et les passages de l’existence, de la vie donnée à l’arrachement, de l’amour à la souffrance, quand les deux ne sont pas mêlés.

    (B. Longre, août 2008)

     

    http://users.swing.be/esperluete/

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  • Louÿs le voluptueux

    small-volupte.gifUne volupté nouvelle et autres contes de Pierre Louÿs - L’Arbre vengeur, 2008

    « L’important est d’avoir toujours une cigarette à la main ; il faut envelopper les objets d’une nuée céleste et fine qui baigne les lumières et les ombres, efface les angles matériels, et, par un sortilège parfumé, impose à l’esprit qui s’agite un équilibre variable d’où il puisse tomber dans le songe. »

    Ainsi s’exprime (n’en déplaise à nos contemporains hygiénistes) un écrivain en mal d’inspiration, narrateur de la nouvelle éponyme de ce recueil, qui voit un soir débarquer chez lui une inconnue prétendant être une certaine Callistô, venue de la Grèce Antique. L’écrivain pense d’abord avoir à faire à une affabulatrice mais les propos de la belle l’intriguent : elle soutient en effet que rien n’a vraiment changé depuis son époque lointaine, et elle s’en voit fort déçue. Puis, en parfaite conférencière, elle énumère avec force exemples tous les domaines dans lesquels les Grecs excellaient déjà, déplorant qu’en près de deux mille ans, l’espèce humaine n’ait pas su inventer davantage et renouveler les arts, les ornements, la philosophie, l’architecture, ou encore les plaisirs charnels. « Vois-tu, le monde est un jeune homme qui donnait des espérances et qui est en train de rater sa vie », lui dit-elle…  En quête d’une volupté « nouvelle », la femme fantôme (pourtant dotée de tous les attraits nécessaires) séduit l’écrivain, qui ne se fait pas prier. Ce texte (conte ou nouvelle, c’est selon) à la fois érudit et cocasse est un bel hommage à l’Antiquité, thème cher à Pierre Louÿs, qui se montre ici fort inventif en télescopant deux époques et deux visions de l’Histoire et de ses mouvements.

    Dans le même recueil, on retrouve l’antiquité dans La nuit de printemps, sorte de vaudeville tragique (comme si la tragédie ne pouvait appartenir qu’à cette époque), où le grotesque le dispute à l’effroi. Ailleurs, c’est Vénus qui est invoquée (Une ascension au Venusberg), dans un texte où un vieil homme tourmenté, pour ne jamais avoir goûté à l’amour charnel (« je me suis damné par ma faute en mentant chaque jour à la loi de la vie »), se confie au narrateur. Un désespoir que l’on rencontre sous une autre forme dans L’In-plano, Conte de Pâques, où la petite Cécile, en l’absence de ses parents, explore la bibliothèque qui lui est interdite, un lieu qui lui offre un aperçu de la suite de malheurs que la vie lui réserve ; une fable désespérante et faussement édifiante, où l’hypocrisie adulte (causée par le désir de surprotéger l’enfant en lui dissimulant la vérité de la condition humaine) est dévoilée, quand le père dit à la fillette : « Voilà ce qui arrive aux petites filles qui vont dans les bibliothèques. Elles lisent sur la vie certaines choses qu’elles n’ont pas besoin de savoir… » D’autres, pour échapper à certains tourments existentiels, se réfugient dans le célibat, telle la narratrice de La persienne, traumatisée par un drame sanglant auquel elle a assisté à l’âge de 17 ans, qui lui « a tout appris », par procuration, des « réalités (…), tous les secrets de la vie, de l’amour et de la mort… ». Si l’auteur ne juge pas ouvertement ses personnages, il ne semble pas non plus éprouver d’affection démesurée pour eux, préférant les manipuler, épingler leurs travers ou leurs postures morales, et les observer avec un sourire que l’on imagine tout aussi narquois que celui du lecteur, complice, qui découvrira avec délectation ce petit recueil.

    (B. Longre, juillet 2008)

     

    http://www.arbre-vengeur.fr/

     

    Sur l'auteur, on ira aussi lire cet article de Tang Loaëc : Pierre Louÿs et les 12 princesses 

     

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  • Des contes solidaires

    conteschinois.jpgPour la 5e année consécutive, les éditions Rue du Monde s'associent au Secours populaire et proposent une opération de solidarité en faveur des enfants "oubliés des vacances", intitulée "Eté des bouquins solidaires", qui se déroule du 21 juin au 15 août 2008.

    Deux ouvrages parus en juin sont concernés par cette initiative : La grande montagne des contes chinois de Catherine Gendrin et Fabienne Thiéry, illustré par Vanessa Hié (un recueil de près d'une vingtaine de récits adaptés de contes ou de fables), et Le bufflon blanc de Fabienne Thiéry, illustré par Judith Gueyfier. Chaque fois que ces deux titres sont achetés en librairie, un enfant recevra un livre. Plus de 60000 jeunes lecteurs ont déjà pu bénéficier de cette opération depuis l'été 2004.

    Rue du monde
    5, rue de Port-Royal, 78960 Voisins-le-Bretonneux
    http://www.secourspopulaire.fr

    bufflon.jpgLe bufflon blanc de Fabienne Thiéry et Judith Gueyfier, Rue du monde, 2008

    Li, éleveur de buffles, s’inquiète quand naît un bufflon blanc qui dénote dans son troupeau noir. Serait-ce mauvais présage ? Le vieux sage qu’il consulte, connu pour sa clairvoyance, lui assure que non ; mais une fois rentré chez lui, Li est subitement frappé de surdité. Lu, son fils, part alors voir le sage et, dès son retour, est lui aussi victime d’un mal soudain, la cécité. Li et Lu pensent avoir joué de malchance quand des événements bien plus terribles encore s’abattent sur la vallée.
    Librement inspiré d’une fable du philosophe chinois Lie-Tseu, maître taoïste, l’histoire que conte Fabienne Thiéry (spécialiste du conte chinois) a vocation universelle et parle à la fois de résilience, de résignation à son sort, d’impuissance face à plus fort que soi ; elle véhicule toutefois l’idée que la vie se compose d’une succession bariolée de bonheurs et de malheurs et que les uns ne peuvent exister sans leurs contraires. Les illustrations de Judith Gueyfier, qui signe plusieurs albums chez cet éditeur, sont d’une grande finesse dans les plans rapprochés comme dans les plans d’ensemble, avec une attention toute particulière portée aux motifs des textiles, en contraste avec les aplats des paysages à l’arrière-plan ; mais ce sont surtout les visages lumineux tourmentés ou apaisés, en résonance avec le conte, qui séduisent le lecteur. Un bel album à partager et à offrir.
    B. Longre (juin 2008)
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