"Chercher, s’enfoncer. Combien de fois mourir de son vivant, ou plutôt quelle place faire en soi à la mort pour écrire ? Nappes de silhouettes luttant contre des forces aussi liquides qu’elles, têtes humaines heurtant d’autres extrémités froides, mêlant toutes sortes de panaches, pollution atmosphérique, écoulements, câbles, sirènes, conversations, rails, tunnels, à cette mystérieuse ligne mentale ou géographique au-delà de laquelle revenir ne signifie plus rien. Etrange rivalité entre le voyage et l’écriture, chacun voulant prendre le pas sur l’autre. Chacun voulant tracer sa frontière. Impossibilité de « raconter » ce qui se passe, avalé par la masse de ce qui se produit et dont l’écriture constitue à la fois la négation, l’ossature et la peau. La dimension intermédiaire, placentaire, mélange d’heures, de vagues pensées et de pointes urbaines sert de lubrifiant au tremblement qui court entre les phrases et au- dehors. Devenir ce qui vient et non plus l’accueillir..."
Extrait de "Shanghai n'est pas une ville", de Philippe Rahmy (actuellement en résidence d'écriture à Shanghai, invité par la Shanghai Writers Association avec le concours de Pro Helvetia).
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