Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

illustrations

  • Miniatures

    b89654156e86ebb3b79ae93ac126d4f4.jpgMiniatures de Youssouf Amine Elalamy - Editions Hors'champs (Casablanca)
    prix 12 €, Maroc 65 dh

    Portraits collés

    Recueil atypique et stimulant, Miniatures se compose de cinquante portraits hétéroclites, graves et/ou légers, de brefs tableaux vivants qui renforcent l'idée shakespearienne de l'existence comme une scène (l'auteur avouant en introduction aimer "l'idée d'un livre qui se donne en spectacle") sur laquelle se démènent des personnages pathétiques, amusants, effrayants ou tragiques, à tous les âges de la vie, issus de toutes catégories sociales : on y croise une comédienne obnubilée par le rôle d'Ophélie au point d’en mourir, un journaliste partageant une cellule avec de "vrais" criminels, le seul "trash artist" marocain, un jeune publicitaire sans scrupules, une institutrice battue par son mari et qui maltraite à son tour ses élèves, un enseignant islamiste "hypocrite pratiquant", un foetus ignorant du sort social qui l'attend, une secrétaire qui rêve de romantisme, une fillette que son grand frère rejoint la nuit, un "diplômé-chômeur", un cyber-dragueur, une jeune prostituée, un apprenti kamikaze qui rêve d'un glorieux destin... La société marocaine est ici passée au crible d'une plume acide et réjouissante, faussement neutre, et la satire n'est jamais loin, même lorsque l'auteur se contente de raconter très factuellement, avec un détachement délibéré, et d'accumuler des visions juxtaposées dévoilant avec acuité l'absurdité du monde et les contradictions de la condition humaine en général.

    Saynètes satiriques teintées d'un cynisme amusé, ces Miniatures de Youssouf Amine Elalamy révèlent donc les petits et les grands dysfonctionnements d'un monde entre tradition et modernité, saturé d'images contradictoires et de miroirs déformants, un monde qui oscille entre désespoir (lié au chômage, à la misère sexuelle, aux rapports faussés entre les hommes et les femmes...) et enthousiasme pour des progrès technologiques factices qui apportent un réconfort dérisoire et purement matérialiste ; l'auteur, ne pouvant prendre parti pour l'un ou pour l'autre, rejette avec la même intelligence et la même force à la fois les hypocrisies de l'obscurantisme traditionnel et la misère morale et/ou sociale qui l'accompagne, et la vision d'une humanité manufacturée et posée sur papier glacé — à l'image de Rochdi, ce golden boy qui imite maladroitement le modèle américain, de Btissam, une étudiante qui, ayant posé pour la couverture d'un magazine féminin, est maintenant prise au piège de sa propre image, ou de Soraya, qui "ne peut survivre sans porter de masque", victime d'une "crise de masquillage aiguë"...

    Lire la suite de l'article

    Lien permanent Catégories : Critiques 1 commentaire 1 commentaire
  • Magazine TOC - Chroniques 2005-06

    4230774d71760429b57635758345bd8d.jpg

     Les Démons caca de Fabienne Loodts, Editions Esperluète, 15 euros.

    Vade retro…

    « Nous avons tous notre démon caca », raconte Fabienne Loodts, talentueuse auteure-illustratrice belge ; dans cette étonnante série de portraits pleine page exécutés au fusain, chaque personnage se retrouve affublé, en guise de couvre-chef, d’une étrange bestiole (démon grimaçant, dragon difforme, gargouille aux griffes acérées, gremlins en noir et blanc…), à la manière d’un ornement maléfique qui le suit partout où il va : ces diablotins sont l’incarnation de la noirceur que l’on porte en soi, et on peut accepter leur tyrannie, s’en accommoder, ou l’accueillir à bras ouverts, on peut aussi tenter de dissimuler son démon ou l’affronter violemment, en vain ; l’on choisira alors d’apprivoiser la bête et de minimiser son emprise par le biais d’un dialogue lucide…
    En dépit de son titre surprenant, cet ouvrage n’a rien de scatologique (hormis la malfaisance infantile et primaire de nos propres démons), et c’est d’abord un objet artistique remarquable où les textes, brefs et limpides, accompagnent les illustrations sous forme de légende. L’allégorie évoque quelque ancienne vision infernale, tel un bestiaire moyenâgeux remis au goût du jour –  et sous-entend l’idée que l’humain est bel et bien une créature hybride, capable du meilleur comme du pire, mais seule responsable de ses choix.
    © B. Longre

    www.esperluete.org/

    www.wesentlich.com/fabienne

    Lien permanent Catégories : Critiques, Littérature francophone 0 commentaire 0 commentaire