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  • Souvenirs contre oubli

    block.jpgHistoire de l’oubli de Stefan Merrill Block
    traduit de l’anglais par Valérie Malfoy, Albin Michel, 2009

     

    « A place where nothing was remembered and so nothing was lost »

     

    Fresque sur la filiation et la transmission combinant tous les ingrédients que l’on attend d’un roman bien dosé, entre émotion et érudition, Histoire de l’oubli se fonde sur quatre récits morcelés, parallèles, alternés, puis croisés et nous mène en un seul mouvement de l’histoire à la préhistoire, de la génétique au fantastique, du pouvoir des histoires transmises oralement à la puissance de l’imagination, du microcosme au macrocosme, des affres de l’adolescence à la dégénérescence intellectuelle qui accompagne parfois la vieillesse… Une complexité qui ne doit pas rebuter le lecteur, qui découvre en temps voulu ce qui rapproche Abel, ermite texan de 70 ans, bossu de naissance, qui vit sur ce qui reste de la ferme familiale, et Seth, adolescent solitaire qui, à 14 ans, a compris que sa mère souffrait d’une forme rare et héréditaire de la maladie d’Alzheimer ; une situation qui incite le jeune homme à reconstruire empiriquement l’histoire génétique de sa mère, malgré les secrets et les non-dits qui polluent l’histoire familiale. Car Seth peut aussi compter sur des récits réinventés et transmis de génération en génération : l’histoire intercalée de la cité d’Isadora, monde parallèle intemporel, fascinant, reflet paradisiaque du nôtre, où les habitants sont dépourvus de mémoire.

     

    La multiplicité des voix narratives et le désordre chronologique délibéré (à l’image du chaos qui règne dans nos cerveaux saturés de souvenirs plus ou moins fiables…) invitent le lecteur à reconstruire un puzzle impeccablement élaboré ; l’on passe ainsi d’une intrigue à l’autre sans effort, prenant plaisir à comprendre comment tout fait peu à peu sens. Fils conducteurs inévitables de ce beau roman, l’idée de mémoire, constamment fouillée – une mémoire toujours sélective (« We remember what we want to remember ») – et la place accordée au souvenir dans le temps présent.

    Lire aussi un entretien avec l'auteur, qui signe là son premier roman :
    http://www.albin-michel.fr/pages/interview/mblock/interviewmb.html

     

    Lien permanent Catégories : Critiques, Littérature étrangère 0 commentaire 0 commentaire