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naturalisme

  • Fièvre d’écrire

    katai.jpgFuton de Kataï, récits traduits du Japonais par Amina Okada, Le Serpent à plumes.

     

    A la fin du XIXème siècle, Kataï découvre la littérature occidentale et se sent "brûler de la fièvre d'écrire". Les œuvres de Maupassant, tout particulièrement, influencent le jeune auteur, qui y découvre la bestialité de l'homme et un registre : le naturalisme. Futon, écrit en 1907, relate une histoire inspirée par ce que vécut l'écrivain quelques années plus tôt, alors qu'il accueille chez lui une jeune provinciale fascinée par ses romans, qui souhaite devenir son élève. Ce récit intimiste narre dans le détail les tourments amoureux de Takénaka Toki.o, un professeur de littérature d'une trentaine d'années ; marié et père de trois enfants, irrésistiblement attiré par cette étudiante dont la jeunesse lui fait regretter la sienne, il tente de se raisonner, en vain, jusqu'au jour où la jeune fille, en élève obéissante, lui révèle son amour pour un autre, ce qui fait naître en lui une terrible jalousie.
    A travers ce roman à la troisième personne (mais tant centré sur Toki.o qu'on se surprend à entendre "je"), l'auteur parvient à mettre l'âme humaine à nu : rien n'est dissimulé, ni les pensées exaltées ou mesquines, ni le paternalisme abusif du personnage, ni son hypocrisie vis à vis de sa femme ou de la jeune fille, à qui il enseigne la littérature amoureuse occidentale (Tourgueniev) ou à laquelle il explique comment les jeunes filles modernes doivent profiter de leur liberté... A sa parution, Futon déclencha autant les louanges que les critiques et le titre même du roman (mot désignant un élément de literie) fit scandale, par ses connotations érotiques. Mais un genre était né, qui allait influencer nombre d'auteurs.
    Les deux nouvelles qui accompagnent ce court roman mettent en valeur l'absurdité de la cruauté humaine. Le soldat, aux résonnances antimilitaristes surprenantes pour l'époque, relate la marche fatale d'un fantassin durant la guerre russo-japonaise en Mandchourie (Kataï lui-même avait servi sur le front) et sa lente agonie. Une botte d'oignons est là encore le récit d'une agonie : celle d'O-Saku, jeune paysanne dont l'existence n'est qu'une suite de malheurs et de labeur ; trompée et ignorée de tous, son désespoir la conduit à commettre un acte terrible, innommable. C'est dans cette nouvelle que ressort particulièrement la veine naturaliste et l'influence de Maupassant, l'auteur s'efforçant de demeurer objectif et de décrire, dans un souci de vérité, la réalité crue du monde, sans chercher à le poétiser ou à entrer dans les pensées du personnage : aucune trace d'introspection dans Une botte d'oignons pourtant tout aussi intense que Futon.

    (B. Longre)

    http://www.editions-picquier.fr/

    Lien permanent Catégories : Critiques, Littérature étrangère 1 commentaire 1 commentaire