Le syndrome Godzilla de Fabrice Colin - collection Les Mues, Intervista.
Le syndrome adolescent
Entre France et Japon, Fabrice Colin nous invite à entrer dans le monde intérieur d’un adolescent qui rêve de métamorphose, un univers narratif composé de séquences relativement brèves, parfois morcelées, qui empruntent de temps à autre au style cinématographique. Le garçon rêve d’une transformation radicale qui lui permettrait de donner un sens à sa vie, de se trouver, et peut-être de surmonter la disparition d’une mère dont on ne saura pas grand-chose, hormis qu’elle se serait suicidée, une perte qui a marqué l’enfance. La mère, justement, présence qui dit rarement son nom mais qui plane dans l’esprit du narrateur - solitaire de son plein gré, nomade par le métier de son père. Une existence quelque peu mécanique - « ça fait des années, et rien ne change, tout est figé dans un présent éternel qui s’étire… ». Mais de coups de fil énigmatiques en rencontres qui ne le sont pas moins avec un inconnu dont le visage est caché sous un sac en papier, les choses vont enfin bouger et une obsession grandissante pour la figure du monstre Godzilla et de ses diverses facettes, au fil de sa filmographie, va mener le narrateur sur des routes aux issues multiples, vers des ailleurs possibles, à condition de conjurer le sentiment de culpabilité qui le maintient en enfance et de se débarrasser des démons et des blessures du passé, comme on le ferait d’une vieille peau.
Roman d’apprentissage déguisé en fantasmagorie métaphorique (du moins dans la seconde partie, où le narrateur retrouve Tokyo, ville de ses « rêves » et aussi de sa mémoire, « carrefour éternel », où évolue en parallèle un autre double de Godzilla, dont on suit le récit autobiographique), Le syndrome Godzilla est un beau texte déstabilisant, hors normes, habité d’une indéniable mélancolie qui n’empêche pourtant pas d’envisager l’idée rassurante d’un avenir. (B. Longre)
"Les Mues"
L'intitulé de cette collection créée aux éditions Intervista par Constance Joly-Girard évoque d’emblée transformations, métamorphoses et autres mutations – sans oublier l’idée associée de transition. Car rien n’est jamais immuable, justement, et les changements de peau successifs que nous connaissons tous sont partie prenante de l’expérience humaine. L'éditrice entend, depuis le début, proposer une littérature « transgenre, moderne, audacieuse et sans tabou », résolument « adulte », mais dans laquelle les adolescents et les « jeunes adultes » sont tout à fait susceptibles de se retrouver.
La collection accueille des textes très différents les uns des autres – des choix qui reflètent une belle ouverture d’esprit mais aussi le désir de lancer de nouveaux auteurs aux côtés d'auteurs confirmés, hors des sentiers battus, ou des artistes dont c'est la première incursion dans un univers livresque. Du vent dans mes mollets, de Raphaële Moussafir, relate les expériences et les découvertes d’une fillette de neuf ans, Rêver, grandir et coincer des malheureuses (sous-titré "Biographie sexuelle d'un garçon moyen" ! très amusant) de Frédéric Recrosio, "parle de sexualité sans une once de vulgarité ni de misogynie", L’enchanteur et illustrissime gâteau café-café d’Irina Sasson de Joëlle Tiano mérite assurément le détour et Enfin nue ! de Catherine Siguret, "confessions d'un nègre écrivain", qui pratique un drôle de métier, est disponible en librairie depuis le 15 mai dernier.
Commentaires
Tout cela est intéressant et merci de nous en faire part.
Mutation, transformation, métamorphose, changement de peau, thèmes éternels et pourtant inépuisables car tellement vrais quand la poésie s'en empare.
Pour le critique cité, drôle d'idée quand même d'associer d'emblée, même si c'est en guise de garde-fou, le mot sexualité avec misogynie et vulgarité.
Bien cordialement
j'ai lu dans les livres cités l'enchanteur gâteau café-café qui est un petit régal ! je lirai sans doute d'autres titres de cette collection qui é décidément l'air bien intéressante!